Vendredi 16 novembre
Aujourd’hui, Jésus nous donne une consigne importante : « Veillez ! » Pour nous aider à comprendre cela, je dirai que notre vie c’est un peu comme une route. Nous sommes tous invités à aller de l’avant. Mais quand nous circulons en voiture, nous savons que beaucoup d’accidents arrivent parce que le conducteur s’est endormi ou a manqué de vigilance. Pour notre vie c’est un peu la même chose. Jésus connaît bien toutes nos faiblesses. Il sait que nous avons souvent la tentation de nous endormir et de nous laisser aller. « Veillez, nous dit-il, car vous ne savez pas quel jour votre Seigneur doit venir. »
L’évangile de ce jour nous rappelle ce qui s’est passé à l’époque de Noé : « On mangeait, on buvait, on se mariait0. » Il n’y avait là rien de mal. Le problème c’est qu’on vivait dans l’insouciance. Les gens ne se sont doutés de rien jusqu’au jour où le déluge les a tous engloutis. Cet avertissement vaut aussi pour nous. Quand nous organisons notre vie en dehors de Dieu, quand nous vivons dans l’insouciance, il ne faut pas s’étonner du déluge qui s’abat sur nous. Ce déluge c’est celui de la publicité, surtout à l’approche des fêtes ; c’est aussi une avalanche d’informations souvent déprimantes qui nous viennent des quatre coins de la planète. Ce déluge c’est encore l’inondation de l’argent roi. Le résultat c’est que l’on fait de la rentabilité une valeur première qui enrichit les plus riches et enfonce les plus pauvres dans leur pauvreté. Et puis, comment ne pas penser à tous ces déluges de feu provoqués par les guerres, les actes terroristes, les génocides et les violences de toutes sortes.
En ce jour, Jésus voudrait nous inviter à réagir contre ce déluge d’individualisme et d’égoïsme qui risque de nous submerger. Se mettre en état de veille c’est sortir de la banalité et de la médiocrité, c’est retrouver ce qui fait la vraie valeur d’une vie, c’est être attentifs à la présence du Christ en nous et autour de nous.
Ce qui s’est passé au temps de Noé s’est renouvelé à la naissance de Jésus. « Il est venu chez les siens et les siens ne l’ont pas reconnu. » Les gens menaient une vie tout ordinaire ; ils ne faisaient rien de mal. Mais ils n’ont pas sur reconnaître la présence du Christ sauveur à travers ce petit enfant. Seuls les bergers et les mages ont fait le déplacement pour venir le rencontrer.
Le même Jésus continue à venir. Il est là sur notre route. Il vient à notre ren-contre. Et c’est là qu’une mise au point s’impose : le temps de l’Avent n’est pas seulement un temps où l’on se préparer à fêter l’anniversaire de la naissance de Jésus ; c’est surtout un temps qui nous rappelle que chaque jour, nous sommes en attente de la présence de Dieu. Jésus est là, tout près de moi. Comme Jadis, ce sera souvent sous les traits d’un homme pauvre et seul. A moi de savoir le reconnaître.
Jésus est là oui bien sûr. Et pourtant il veut se faire attendre. Cette attente n’est pas d’abord une question de temps mais de désir. Ce désir de rencontrer celui que nous aimons fait grandir notre amour pour lui. Quand il est loin, nous nous faisons tout pour que son retour soit vraiment une fête. C’est exactement ce qui doit se passer entre nous et Jésus. Notre vie est un avent perpétuel. Ne nous posons pas la question de savoir comment cela se passera à la fin du monde. Le plus important c’est d’entretenir cet ardent désir de voir Jésus. Toute la liturgie de ces quatre dimanches nous pousse à creuser en nous cette soif de Dieu.
Quand Jésus nous demande de veiller et de prier, ce n’est pas une menace. C’est surtout une mise en garde contre le risque de ne pas reconnaître le passage du Seigneur dans notre vie. Il voudrait nous éviter le risque de passer à côté d’une ren-contre fabuleuse. Ce serait vraiment un terrible gâchis de passer à côté du Christ sans le reconnaître.
Malheureusement, notre manque de foi nous met souvent en état d’hibernation spirituelle. Et c’est là qu’il nous faut réentendre le message de saint Paul. Il nous donne en effet un éclairage intéressant sur la manière de veiller. Il nous invite à rejeter les activités des ténèbres et à revêtir le combat de la lumière. Rejeter les activités des ténèbres, c’est repousser le mal, lutter férocement contre lui, ne pas consentir à nous laisser envahir par ce déluge.
Veiller c’est d’abord reconnaître ce qui doit changer dans notre vie. Chacun de nous a un coin de son cœur à convertir. Saint Paul nous invite à «revêtir le Christ. » Cela veut dire que nous sommes appelés à être près de lui, à le prier, implorer son aide et surtout nous mettre à son écoute. Revêtir le Seigneur Jésus c’est aussi travailler à avoir un regard semblable au sien et des comportements inspirés des siens. Il s’agit pour nous de mettre tout l’Evangile dans toute notre vie.
Dieu est là depuis toujours, au fond de notre cœur, au plus profond de nous-mêmes. Dieu est là ; c’est nous qui ne sommes pas là. Nous sommes toujours dehors à nous agiter, à courir dans tous les sens. Le premier travail de l’Avent sera de nous rendre présents à nous-mêmes, de revenir au centre de nous-mêmes. Le Seigneur vient. Et c’est là qu’il va nous rencontrer.