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Dans notre vie, il y a des repas ordinaires. Il y en a d'autres qui nous marquent pour toute la vie : repas de fiançailles, repas de noces, la veille d’un grand départ. Les gens s’invitent à prendre un repas quand ils ont des choses à dire, à échanger, à partager, à régler, à vivre. Le repas est un partage, pas seulement de nourriture mais aussi de paroles, de gestes qui disent l’amitié ou la brisure, la joie ou la tristesse, le départ ou le retour.
Jésus a convoqué ses amis pour un repas juste avant sa mort : c’est qu’il a des choses importantes à partager avec eux. Il partage la nourriture. Les aliments, surtout le pain ne sont pas faits pour être mangés tout seul. Ils sont faits pour être pris avec d’autres. C’est là un premier signe d’amitié. Ensuite, il partage son Corps et son sang à travers le pain et le vin : "Ceci est mon corps… ceci est mon sang…" C’est là le signe de l’alliance que le Seigneur conclut avec ses disciples et avec l’humanité tout entière.
L’évangile nous montre Jésus à genoux devant ses disciples pour leur laver les pieds. Ce geste ne correspond plus à notre mentalité ni à notre culture d’aujourd’hui. Mais à l’époque, c’était un geste très habituel qui se pratiquait en signe d’hospitalité. Le serviteur de la maison se mettait à la disposition des arrivants pour assurer ce service. Alors, ce qui aurait été normal, c’est que Jésus se fasse laver les pieds. Or c’est tout le contraire qui se passe. Lui, le Maître et Seigneur, se met à genoux devant ses disciples. Il voulait leur faire comprendre jusqu’où allait son amour. Il voulait leur montrer qu’il les aimait assez pour se mettre à leur service.
Et Jésus termine en disant : «c’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez comme j’ai fait pour vous. Les disciples n’ont certainement pas compris sur le coup. Ce que Jésus nous demande, et que Pierre a eu du mal à accepter, c’est de nous laisser aimer par lui ; c’est là un premier point. Il nous demande surtout d’aimer comme lui, avec la même radicalité et le même absolu.
Le message du jeudi saint c’est que nous sommes aimés par Dieu qui se fait notre serviteur. Nous sommes appelés à aimer comme lui, autant que lui, aussi profondément que lui. C’est un idéal vers lequel nous sommes invités à tendre jusqu’à notre dernier jour. Des gens qui se mettent au service des autres, nous en voyons tous les jours. Tout au long des jours et des semaines, nous sommes marqués par les images de violence. Face à cette douloureuse situation, des personnes, des associations font tout ce qu’elles peuvent pour réagir.
Il y en a qui le font humblement, sans faire de bruit. Nous pouvons penser à tous ces groupes et associations qui s’occupent d’accueil et d’animation dans les quartiers difficiles, qui luttent contre la misère et l’exclusion. Tout cela c’est une réponse à l’appel du jeudi saint. Bien sûr, elle est très incomplète. Il y faut aussi notre participation. Un geste d’égoïsme augmente la dose de poison dans le monde. Un geste de partage, d’accueil et de solidarité la diminue.
En ce jeudi saint, nous sommes invités à élargir notre regard à la dimension de celui de Jésus, un regard solidaire de tous ceux qui nous entourent. Nous allons communier au Corps et au sang du Christ. La même invitation nous est adressée chaque dimanche ici dans cette église ou dans une autre. Ce que Jésus attend de nous, c’est un geste vrai. L’idéal ce n’est pas seulement de se laisser aimer par le Christ ; ce n’est pas non plus d’aimer le Christ comme il nous a aimés. L’idéal c’est de nous aimer les uns les autres comme il nous a aimés, c’est d’être solidaire jusqu’au bout. C’est à ce prix seulement que nous pourrons célébrer le repas du Seigneur dans toute sa vérité